Le regret de la terre
Quelques vers du poète Franco-uruguayen, Jules Supervielle, né en 1884 à Montevideo (peut être pas loin de l'une des ces plages que fréquentait Alain Bashung, là où il y avait des cerfs-volants ...), l’ auteur du « forçat innocent ». Il dit l’ Enfance et l’ Innocence. Il dit le temps et le soleil, le temps avant la perte de connaissance; il dit le rêve, il dit la Vie et la Mort.
Le regret de la Terre
Un jour, quand nous dirons : « C’ était le temps du soleil,
Vous souvenez-vous, il éclairait la moindre ramille,
Et aussi bien la femme âgée que la jeune fille étonnée,
Il savait donner leur couleur aux objets dés qu’il se posait
Il suivait le cheval coureur et s’arrêtait avec lui,
C’ était le temps inoubliable où nous étions sur la Terre,
Où cela faisait du bruit de laisser tomber quelque chose,
Nous regardions alentour avec nos yeux connaisseurs,
Nos oreilles comprenaient toutes les nuances de l’ air
Et lorsque le pas de l’ami s’avançait nous le savions,
Nous ramassions aussi bien une fleur qu’un caillou poli.
Le temps où nous ne pouvions attraper la fumée,
Ah, c’est tout ce que nos mains sauraient saisir maintenant »