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lettresdumonde
21 août 2018

Après le bain

Dans la mer du nord, la température de l'eau n'était pas élevée, entre douze et treize degrés, le 13 juillet 1907. Je ne m'étais pas baignée nue, personne ne m'avais vu d'ailleurs, j'étais descendue par derrière, directement dans l'eau salée, de ma roulotte de bois magnifique, neuve. Au loin un  navire à voile sans regard, se promenait.Vingt minutes dans l'eau froide, je passais tous les matins, la plage de Boulogne sur mer, la Gesoriacum  et ses termes de ville me tournaient le dos ... J'étais bien, je nageais, les cheveux déliés.

Par ce franc soleil de Juillet, la mer était d'opale, l'eau clair d'un  torrent  d'Auvergne. Vingt minutes dans cette baignoire sans fond, poignet sur Douvres, le sel faisait savon.

Et puis j'étais remontée dans mon chariot par la petite échelle en chêne, rongée par le sel. Ma peau piquait, mais c'était bon. Un grand goéland, ramure blanche et bec jaune me regardait indécemment. Assise , à même le bois, j'avais repris ma lecture de La vie demeure de John Wastrek, la gazette, le bruit des poudres, ne m'intéressait pas, je lisais.

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La roulotte dansait sur le sable, île flottante. Je lisais, les lignes en vague de Virginia. J'étais partie pleurante, depuis les coteaux du mont d'Ostrove perchés en haut de la rivière Liane. Père s'était fâché rouge. J'avais tranché à pleine dent d'adolescente le sérail par un petit amour indigne et  naissant.. . Une jeune  fille blonde d'en bas, du port , d'un testicule de marins buveurs et vulgaires, imaginez ! Sur le plancher magnifique, reposait un canon Renoir, d'une Beauté qui me touchait. La Beauté me touchait, en retour, en amie, je voulais la toucher. Le roman courait sur une histoire de ces germes là, la vie comme un ru devait couler, filer partout, saumon vers sa source de jouvence. La mer me portait un œil complice,

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indifférente à la morale des autres. Ici en 1907, je pourrai, protégée par l'essence de ce beau bois, faire l'amour avec une jeune fille de trois ans mon aînée, belle comme un port aux lèvres et bras ouverts.

Elle aimait que je lui lise, l'école n'était pas passée par elle, le filetage de son esprit, à longueur de jour, de quatre heures aube à cinq heures soir, était celui des harengs de Capecure .

Demain la mer nous porterait, lierait la force d'amour d'un amour naissant et interdit.

Le livre le disait, le siècle était à nous pour nager, ensemble et enlacées dans l' Opale libre. Gloire à accubens et à son réseau plaisant.

spacemat

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