Les amoureux de quinze ans
Les lèvres nutellées d’enfants
Avec leur trente à peine
Contre le pont vert
Qui enjambait le canal
Comme leurs parents
Il y a vingt ans …
Il a senti son petit corps
Sa langue comme un oiseau léger dans sa joie
Elle a senti son parfum d’ homme naissant
Et à ce petit corps tendu
Son corps s’est tendu
Quand le baiser grandissait
Devenu tout entier un baiser
Même la rive se soulevait…
Le temps s’arrêtait …
Et la rivière fuyait
Dans l’ombre de ce baiser
Ses rides riaient complices.
Et Doisneau se souvenait
Que sous un autre fleuve
Que dans un autre temps
De la chaleur du baiser
Le bonheur se penchait
Elle avait fermé ses cils
Le temps ne passait plus
Lui, la couvait comme un jarre
Dans un jeu d’oie aimé
Et la rivière passait en sifflant
Même le métal vert écaillé
Prêtait sa hanche bombée
Aux amoureux …
C’était des enfants
Ils avaient préféré le baiser
Au bruit des fumées
Sa bouche en retraite dans sa bouche chérie
Ses cheveux blonds comme une pluie de blé.
Ces petits corps de trente ans
Arpégeaient un enfant
Un papier mobile , berceuse de naissance
C’était un baiser beau !
C’était des adolescents
Quand la rivière glissait
Le ciel s’énamourait
Et prêtait ses souvenirs
À ces enfants heureux.
Ils partaient déjà dans le vent
Du « rentrer à l’heure »
Mais leurs baisers se suivaient
Dans la nuit éparpillée…